lundi 26 février 2018
Lendemain de cuite
Se lever parce qu'il le faut bien, sinon c'est que l'on est mort ; aller à la cuisine, allumer le feu sous la cafetière que nous avions judicieusement préparée la veille, ce qui nous évite d'y mettre deux plombes ce matin et de renverser la moitié du paquet de café à côté ; retourner au canapé, fermer les yeux encore deux minutes ; aller chercher café quand cafetière siffler, s'en servir une tasse ; intranquillité : avons nous oui ou non bien fermé le gaz ? Retourner à la cuisine pour constater que oui bien sûr, quelle idée, nous l'avions bien fermé. Revenir au canapé, goûter café trop chaud ; racler pituite au fond de la gorge ; dilemme : qu'en faire ? L'ava...non, quand même pas ! Se relever, éliminer pituite dans les W-C* ; puis de nouveau le canapé pour y boire une gorgée de café tiédi ; allumer la radio, l'éteindre aussitôt car y passe une chanson insupportable, sauf peut-être pour un jury de l'Eurovision, qui aggrave notre nausée, agace nos nerfs ; allumer cigarette, infâme cigarette, écœurante cigarette ; la poser dans le cendrier au milieu des mégots de la veille, la laisser se consumer bêtement ; parcourir d'un regard étonné la pièce comme si nous la découvrions pour la première fois alors qu'on y a ses habitudes depuis pas mal de temps déjà ; s'arrêter à la pendule en carton, vaillante pendule en carton, increvable pendule en carton, blanchie par la poussière, que nous avions achetée au Musée des Arts Décoratifs il y a une éternité à l'occasion d'une exposition temporaire ; le nom de l'exposition ? Ce n'est certes pas ce matin que l'on s'en souviendrait. Onze heures. Ecouter les sons qui montent de la rue ; pas de beaux sons dans ce boxon : sons de travaux, de klaxons, de civiques engueulades, sons de la vie normale ; se demander si la notre de vie l'est, normale ; se prendre la tête entre les mains, sentir son cœur battre dans ses tempes, se rassurer en constatant que si les coups sont forts, au moins sont-ils réguliers, bien espacés ; se promettre, se jurer, que jamais plus au grand jamais on ne se fera avoir ; reprendre espoir en se disant que notre cas ne peut aller qu'en s'améliorant comme nous l'avons lu récemment chez le Vieux..................
...............dix neuf heures. Mais dites moi : ne serait-ce pas l'heure de l'apéro ?
*Que des petits malins pleins d'humour rebaptisent, je l'ai vu, "Winston Churchill".
mardi 27 février 2018
Logement ouvrier
Ce soir il n'y avait rien dans le frigo. Enfin si, il y avait plein de trucs, mais rien qui me disait. J'ai dit à ma belle qui se nourrit d'un rien, elle, (ce pourquoi d'ailleurs elle est toujours aussi belle) : "je me casse, j'ai les crocs, j'vais manger un couscous".
Je l'ai laissée étonnée avec sa biscotte tartinée d'une crème au lait pasteurisé
en suspension devant sa bouche.
Au couscous je m'en suis mis ras la dent.
Puis, repu de boulettes et de brochettes, de vin gris, j'ai avisé dans cette rue autrefois populaire, toute une série de bagnoles de marques, rutilantes , pimpantes, arrogantes. A. venant me resservir une boukha, je lui fis part de mon étonnement :
- c'est quoi ça ? On n'est pas à Medellín ici !
- c'est devenu très cher ici tu sais... pas loin de 10000 le m2.
La rue, mignonne certes mais sans caractère particulier, est une suite de logements ouvriers bâtie au début du vingtième. Une ancienne rue de prolos quoi. Et j'aimerais que l'on réfléchisse à cela une seconde : des bourgeois, ou qui se vivent comme tels, qui s'en vont tous les matins bosser à la Défense, par exemple, le costume bien mis, regagnent le soir venu leurs chez eux qui étaient autrefois des logements ouvriers. Des logements ouvriers !
Quand un pays n'a plus à offrir à son élite, pour se loger, que de jouer les parasites ou les coucous dans l'habitat des classes inférieures du temps passé, c'est qu'il est définitivement foutu.
Ou que l'élite en question n'est composée que de prolos qui s'ignorent.
Publié par Fredi M. le février 27, 2018
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Lâchez-vous !
Mais en gens bien élevés tout de même...