jeudi 12 septembre 2024

Le moment approche


Je sens que le moment approche. 

Trop de solitude, trop de mélancolie qui m'assaille, trop de souvenirs dans le silence : j'ai besoin des bruits de la ville pour ne plus penser. 

Un matin je me lèverai et, sur un coup de tête, je prendrai un billet pour Paris. 

Mais je sais aussi que, quand le TGV ralentira à l'approche de la gare de Lyon, je me dirai "pourquoi as-tu fait ca ?".



dimanche 8 septembre 2024

Éloge de la pantoufle



Je ne sais pas comment il faut interpréter le goût des pantoufles, le mien particulièrement, mais j'avoue avoir pour cet accessoire une sympathie affirmée et jamais démentie. J'en viens à me demander comment on peut les quitter, quelle raison obscure nous oblige à les délaisser au matin au pied du lit jusqu'au soir. Il n'est plus loin le jour où, me fichant bien du "qu'en dira-t-on", j'irai faire mes courses au Carrefour Market en pantoufles-pyjama, comme le dernier Des Esseintes.

J'avais fait un billet sur le sujet, il y a trois ou quatre ans, dans lequel je disais déjà le bonheur d'enfiler une paire de pantoufles. Et ce n'est pas là un signe de vieillesse ou de grabatairgite avancées ! Non. C'est juste une certaine idée du confort... 

Les miennes commençaient... comment dire... à sentir un peu... Alors aujourd'hui je m'en suis offert une nouvelle paire, toute fraîche, toute neuve, doublée laine, fabrication française (quelle chance  que de ne pas avoir abandonné ce savoir-faire bien de chez nous à quelque star-up chinoise...)

Quel bonheur ! 

Pantoufler, pantouflage ! Quelles plus belles expressions ! Quel plus beau programme ! Que désirer de plus délicieux ! 

Quand on a des pantoufles aux pieds, une certitude saute aux yeux : rien de grave ne peut vous arriver. Le monde peut bien s'écrouler autour de vous, vous pouvez bien avoir le ticket perdant du loto, ouvrir un Gigondas bouchonné, constater que vos raviolis du soir sont périmés depuis deux ans, tout cela glisse et se surmonte sans plus de difficulté. 

Quand on sent cette douce chaleur irradier jusqu'à ses mollets, on est armé contre toutes les déconvenues, tous les drames de la vie courante. 


L'épisode

D'aucuns le nomment "épisode cévenol", quand d'autres préfèrent parler "d'épisode méditerranéen". Tous ont raison bien sûr : "l'épisode" naît sur la mer Méditerranée surchauffée par l'été, puis, porté par les vents du sud, il s'en va baguenauder vers le continent. Mais, très vite, sa course est interrompue par les montagnes des Cévennes*. Alors, ne trouvant pas d'issue, il se lâche méchamment sur les départements limitrophes : le Gard, l'Ardèche ou l'Hérault sont ses principales victimes. On devrait parler plus justement d'épisodes méditerranéo-cévenol tant les deux sont intimement liés... 

Ici à "S", le premier de ces épisodes s'est déroulé hier soir. Moins violent qu'annoncé, moins violent que ce qu'il m'a été donné de vivre dans le passé, il n'en a pas moins été remarquable. Le ruisseau, dont j'ai l'habitude de dire qu'il chante ou murmure, est ce matin colère, gronde, charrie des pierres et arrache les berges. Ça ne durera pas : il se lasse très vite. 

Mais cet "épisode" m'aura permis de constater que notre maison avait, ici ou là, des fuites (Félicie aussi...). 

Et voilà que Fredi, qui se croyait si tranquille en sa demeure, va devoir reprendre la truelle...

*Ce qui donne par ailleurs un contraste assez étonnant entre les Cévennes du sud et celles du nord : climat, végétation, y sont radicalement différents. Sur un territoire somme toute pas si étendu, on reste surpris par les changements qui s'opèrent en quelques kilomètres. 

vendredi 6 septembre 2024

Un savoureux spectacle



À ceux qui prétendent que voter ne sert à rien, la "séquence", comme disent les journaleux, leur offre un joli démenti. Alors j'entends déjà les grincheux y aller de leur commentaire éclairé : "vous êtes bien naïf", "il faut que tout change pour que rien ne change, ne le savez-vous donc pas ?", patin couffin... Peut-être. Admettons. Mais convenez que les résultats des derniers scrutins nous offrent l'opportunité d'un savoureux spectacle. N'y a-t-il pas quelque chose de réjouissant de voir partir le freluquet qui occupait depuis huit mois la maison "Matignon" à l'évidence trop grande pour lui ? N'est-il pas jouissif de voir l'occupant de l'Élysée cornérisé, et dont l'agenda, pour les mois et les années à venir, consistera en quelques inaugurations et autres hommages nationaux (que l'on souhaite en nombre limité) ? 

J'ignore quelles seront les réalisations futures de Monsieur Barnier. Mais il nous a promis moins de bavardages et plus d'action. À mes yeux cela constitue déjà un excellent programme.

Rien que pour ça je trouve que ça vaut le coup de se déplacer un dimanche pour aller glisser un bulletin de vote dans l'urne.

Pas vous ? 

jeudi 5 septembre 2024

La bascule




J'adore ce moment de bascule.

Il y a quelques années en arrière, autant que je m'en souvienne, il intervenait plus tôt : vers le 15 août. Quelques orages bien sentis signaient la fin de l'été. Malheur alors à l'imprévoyant qui avait oublié de mettre une petite laine dans ses bagages. Encore que, "malheur" n'est pas tout à fait vrai : il y a toujours, à "S", quelques vieilles guenilles poussiéreuses, bouffées aux mites et démodées, pour les imprévoyants.

La bascule cette année vient de se produire, entre hier et aujourd'hui : il a plu, beaucoup moins que prévu mais enfin le ruisseau chante de nouveau. De nouveau il y a des nuages dans le ciel, jusqu'ici imperturbablement bleu. Les lumières sont magnifiques, les contrastes saisissants, les ombres portées des peupliers s'étirent sur la terrasse, qui n'est plus ce four inhospitalier qu'elle était il y a seulement quarante huit heures.

J'aime cet instant de bascule qui tire un trait sur ce moment imbécile qu'est l'été, annonce l'arrivée de ma saison préférée : l'automne. 

mardi 3 septembre 2024

Mauvaise compagnie




Certains soirs, à "S", je trouvais qu'il y en avait beaucoup... Trop pour tout dire. Alors, avant mon coucher, je partais en guerre contre eux, à l'aide d'une raquette de badminton. "Eux" ce sont les frelons, que l'on appelle par ici les "chabérions" (espèce autochtone). Pendant une demi-heure, je me mettais dans une situation assez ridicule et épuisante... Et le lendemain il y en avait tout autant. 

Et puis, il y a quelques jours, motivé par je ne sais quoi, je suis monté dans une pièce où je ne vais jamais. Outre qu'il y faisait une chaleur infernale, il y régnait un bourdonnement incessant. Le bruit provenait d'une petite fenêtre, totalement habitée. Là, mes chabérions avaient construit, entre la fenêtre et les volets, une sorte de logement collectif, assez réussi d'ailleurs, un peu dans le style "Cité Radieuse". À vue de nez plus de 100 insectes, peu fréquentables et bien dodus, vivaient là. Je dis "vivaient" car dès le lendemain je suis allé faire l'emplette d'une bombe ad hoc. Je ne vais pas m'éterniser sur l'intervention qui fut longue et fastidieuse (finalement victorieuse et sans dommage), mais il y a ici, tout de même, de ces compagnies que je ne recommande à personne.

Et, pas plus tard que ce matin, poussant le balai dans mon salon ? 

Voilà que je ramène dans ma pelle un petit scorpion noir. Ils vivent habituellement sous les tuiles des toitures, dans les fissures des vieux murs. Mais il se trouve des aventuriers pour visiter les maisons. Leur piqûre, même si l'on n'en meurt pas, provoque une brûlure très vive et laisse une douleur persistante.

Voilà, tandis que je suis sans nouvelles de Lylie, que ma belle est de nouveau parisienne, quelles sont mes seules compagnies... 

mercredi 28 août 2024

Cohabitation


La dernière fois que je l'ai vue, elle ou sa cousine, c'était il y a bientôt 50 ans. À vrai dire dans la même journée j'en avais vu deux, l'une du côté de chez Brigitte, de renommée internationale sur ce blog, et l'autre, à peu d'heures d'intervalle, au cours d'une balade à quelques 3 km de "S".

Depuis plus rien, à tel point que je la croyais définitivement perdue, effacée de la diversité. Je l'avais en fait entr'aperçue depuis, mais pas franchement dans son milieu naturel : au vivarium du jardin des plantes, à Paris. Là, on pouvait aussi y voir son aire de reproduction, extrêmement réduite : une trentaine de kilomètres autour de Montélimar.

"Elle" c'est donc "la couleuvre verte de Montélimar", et l'autre jour, en rentrant dans notre grange, je l'ai revue, bien vivante, avec un féroce appétit.

MAIS JE LA DÉRANGEAIS DURANT SON DÉJEUNER.

Attention ! Âmes sensibles s'abstenir ! 

dimanche 25 août 2024

Malédiction !!!



Le phylloxéra dévastait le pays. Au lieu de vin, on but, au dîner, un jus de raisin plus économique, la Parisienne, comme on le nommait. Elle se fabrique en mettant une grappe entière dans un bocal rempli d'eau. L'un après l'autre, les grains fermentent et éclatent. La quantité bue pendant le jour est remplacée par son volume d'eau durant la nuit. Ainsi avec une autre cruche puisée au puits et toujours une autre grappe qui explose et abandonne sa force, une caisse de Parisienne peut suffire à une famille jusqu'au printemps. C'est comme on peut le conjecturer une maigre boisson, mais fort agréable au goût.


Robert-Louis Stevenson, Voyages avec un âne dans les Cévennes


vendredi 23 août 2024

Ce pays...


... ce pays, ce pays...

... le pays, le pays, le pays...

Ils n'ont que ce mot à la bouche, ne sachant plus le nommer... 

mercredi 21 août 2024

L'aveu


Ce qui est rassurant dans cet article de "Courrier International" c'est l'aveu : personne ne comprend pourquoi. 

mercredi 14 août 2024

Trop spécialisés




Hier on a trouvé le père Hubert mort, gelé, dans son comptoir. Les rats avaient commencé d'entamer ce qu'il avait de plus mou à découvert : le cou, les joues et le gras des paumes. Voici longtemps qu'on s'y attendait. Ça n'a surpris personne. Sur le fronton de sa boutique, on déchiffre encore : 

CAFÉ-VINS-LIQUEURS-HOTEL TOUT CONFORT

"Tout confort." Tu parles !

 Rue de bièvre, au 1 bis, tout près du quai. Deux étages et demi, c'est-à-dire qu'il faut être nain ou amputé à hauteur des rotules pour se tenir debout dans les soupentes. L'aspect extérieur est au moins aussi honnête que celui des autres masures de la rue. Mais dès que l'on gravit un étage, on est fixé. Les plafonds se font la malle. Les parois sont concaves ou hydropiques. Aux paliers, on bute dans des trous, des fondrières. Ici, l'élément locataire se compose (où se décompose en) cinq ménages dont trois à la colle, ce qui rassemble vingt et un enfants de deux à dix ans, sans compter ceux au maillot. Les pères ont tous un air de famille : minuscules. Aucun d'entre eux n'atteint un mètre soixante, il s'en faut. Et un postulat commun : ne foutent strictement rien, depuis beaucoup d'années. Le malheur, que voulez-vous. Tous ouvriers ou manœuvres spécialisés, mais spécialisés à ce point, et si malencontreusement, que l'emploi qu'on pourrait leur offrir ne correspond jamais à leur spécialité. Il s'en faut chaque fois d'un poil. Alors : chômage, secours, prime à la naissance, assistance par ici, assurances par là, sociales, pas sociales, dissociales...

 Avec ça on ne vit pas mal et on a pas le gosier sec. Mais payer le "popiétaire", autre histoire. Faut attendre qu'il rouscaille pour lâcher un peu de lest...

Enchantements sur Paris, Jacques Yonnet, Denoël 1957

mardi 13 août 2024

Le Maître des horloges

 


D'aucuns diront que ça sent un peu trop "la peau de chagrin" remaquillée, et ils auront raison. Mais j'aime bien malgré tout : 

..... 

 À l'emplacement exact de la baraque de Cyril, un horloger venu d'Orient, converti à la religion du Christ et qui faisait montre de "grand- piété" s'était installé. Il confectionnait, vendait et réparait des mécanismes, à l'époque fort précieux et rares, destinés à fractionner le fil des heures. 

Sa clientèle ne pouvait être recrutée que parmi les nobles ou les riches négociants. Tristan l'Hermite, qui habitait un hôtel tout proche, appréciait l'habilité de l'horloger et l'avait pris sous sa protection. 

Le commerce des horloges prospérait. L'Oriental avait répudié son nom barbare et se faisait appeler Oswald Biber. (Ce qui désigne un castor, de même que l'ancien mot français "Bièvre".) L'astucieux homme vivait chichement, et cependant on le savait devenu fort riche. Entre temps, des Bohémiens que l'on avait refoulés de la Cité établirent leurs campements aux alentours de Port-aux-Bûches. Ils lisaient l'avenir dans le sable remué du bout d'un bâton, dans les mains des femmes et les yeux des enfants. 

Des prélats s'émurent et crièrent à la magie. Mais il n'y avait point dans tout le port assez de bois pour brûler tous ceux qu'à tort ou à raison on eût taxés de sorcellerie. Les bohémiens, on disait alors "Egyptiens" entretenaient avec l'horloger des relations de bon voisinage. C'est peut-être à cause de cela qu'une rumeur prit corps et s'affirma, selon laquelle le pieux Biber était en réalité détenteur de secrets interdits. Avec le temps, il fallut bien en convenir.

 Certains de ses clients, les plus vieux et les plus fortunés, semblaient ressentir de moins en moins le poids des années. Ils rajdésormais t, et des vieillards virent avec étonnement ceux qu'ils croyaient leurs contemporains redevenir des hommes dans la force de l'âge... 

Ont sut que Biber, en grand mystère, avait construit pour eux des horloges qui ne se souciaient peu d'indiquer les heures : elles tournaient à l'envers. Celui dont le nom était gravé sur les arbres des rouages voyait son sort lié à celui de l'objet. Il revenait sur ses pas, parcourait à rebours la tranche d'existence déjà accomplie, il rajeunissait.

 Une confrérie s'était formée entre les bénéficiaires du merveilleux secret. De nombreuses années s'écoulèrent... 

Et puis un jour, Oswald Biber reçu la visite de ses clients rassemblés. Il le supplièrent : "Ne pouvez-vous faire en sorte que les mécanismes maîtres de nos vies marchent désormais à l'endroit ?" 

- Hélas ! Ceci m'est impossible... Estimez-vous heureux cependant : vous seriez tous trépassés depuis bien longtemps si je ne vous avais traités de la sorte.... 

- Mais nous ne voulons plus rajeunir ! Nous appréhendons l'adolescence, l'inconsciente jeunesse, la nuit de la prime enfance, et l'aboutissement inéluctable où nous rejoindrons les limbes... Nous ne pouvons supporter l'obsession de la date implacable, la date écrite de notre mort... 

- Je ne puis plus rien, plus rien faire pour vous... 

- Mais pourquoi, vous que nous connaissons depuis tant d'années, nous apparaissez-vous toujours sous le même aspect ? Il semble que vous n'ayez pas d'âge... 

- Parce que le maître que j'eus à Venise, en des temps très lointains et qui ne m'a point, ce que je déplore, infusé toute sa science, a construit pour moi l'horloge que voici. Les aiguilles tournent alternativement vers la gauche et vers la droite... Je vieillis et rajeunis d'un jour sur deux...

Enchantements sur Paris, Jacques Yonnet, Denoël 1957


mardi 6 août 2024

Le fossé


La bourgeoisie anglaise, comme celle de l'Europe toute entière, ayant congédié son personnel, se retrouve aujourd'hui face à des émeutes inédites, mais à mon avis destinées à un bel avenir : celles de ceux que l'on a trahis, pour qui les défilés de la Couronne ne veulent plus rien dire, qui ne rêvent que de renverser le carrosse. 

Là-bas comme ici, il a semblé plus simple de remplacer la petite bonne, l'ouvrier, qui arrivaient de Guémené Penfao à Montparnasse, par d'anciens colonisés qui ne savaient écrire, pas plus qu'ils en connaissaient le sens, le mot "droits". En Angleterre ce n'est certes pas Margaret Thatcher qui le leur aura appris...

Mais le fossé semble si grand désormais, entre l'élite et le peuple, que je ne vois pas comment nous pourrons éviter d'autres révolutions, d'autres têtes qui tombent. 

Et ce n'est pas en libérant des places de prison pour y loger les réfractaires que l'on apaisera la situation. 

Quand je serai touriste



Un Petit Ivoirien :

ON LES AIME BIEN

samedi 3 août 2024

Au-dessus des normales saisonnières


- Il dit quoi le bulletin météo pour aujourd'hui ?

- attends, je vais voir... voilà :

Dans un ciel calme et généralement ensoleillé, il souffle une belle brise de nord, nord-est, avec des rafales possibles de 45Kh. Les températures minimales sont de 19 degrés au matin, et de 32 degrés au plus chaud de la journée, 2 degrés au-dessus des normales saisonnières.

- deux degrés au-dessus des normales saisonnières !!!  Mais tu veux me gâcher les vacances ou quoi !?