lundi 25 mars 2024

Cannes suivi de chaussures en peau de porc (archive)

 

 


 


mardi 27 février 2018
Cannes



Ils sortaient du Palais. Deux jeunes hommes et deux jeunes femmes, robes de soirée, smoking et nœud-pap de location. Le film qu'ils venaient de visionner s'appelait "Mare Nostrum" ou quelque chose comme ça. Une histoire de migrants rejetés par la mer sur les côtes inhospitalières de la Sicile, aux portes de cette Europe-forteresse dont les dirigeants se livraient à de navrants calculs, à de honteux comptes d’apothicaires sur la répartition du fardeau. Un film bouleversant promis à de nombreuses suites.
- Je suis bouleversée, fit l'une des jeunes femmes en s'asseyant sur une chaise imitation rotin, à la table d'un restaurant qui se trouvait coincé entre un kebab et une crêperie, dont le menu proposait "moules farcies, daube provencale, 17euros ttc.
Un orchestre (ils étaient trois) de roumains nonchalants descendaient la rue, jouant, fort bien d'ailleurs, sur leurs violons, leur accordéon, les notes traînantes, dégoulinantes, sirupeuses du Parrain.
- nous sommes des salauds !
Elle était au bord des larmes. Son voisin, un rien profiteur, lui caressait son épaule dénudée. Les roumains déjà, sur un signal connu d'eux seuls, repartaient vers d'autres tables, vers le Suquet, sans une pièce, sans un regard.
- et nous en France ! Avec un gouvernement socialiste ! Que faisons-nous ?
Un africain de 2m60 (il portait sur sa tête une pile de chapeaux de paille, le festival cette année étant bizarrement très ensoleillé) arriva à leur hauteur. Sur son avant-bras en présentoir il y avait une centaine de lunettes de soleil aux design variés et, surtout, le dernier né de la technologie chinoise : une perche télescopique permettant de faire des selfies mais "de plus loin". Dans l'indifférence générale il se livra à une petite démonstration, peu convaincante il est vrai, puis, d'un pas fatigué, repris son chemin en se demandant ce qui pouvait bien clocher dans son offre, quelle était vraiment la demande. Les blancs décidément étaient incroyablement compliqués.
Le serveur vint à eux. Pensant bien faire elle s'écarta un peu.
- ah non Madame ! Vous ne pouvez pas faire ça !Tables et chaises doivent impérativement ne pas dépasser cette limite.
Il désignait le caniveau central de cette rue étroite. A deux mains elle prit sa chaise, revint d'un mouvement brusque qui fit joliment danser ses seins, dans les limites autorisées par la municipalité. Le serveur déposa alors devant eux quatre cartes plastifiées en précisant :
- nous n'avons plus de daube provencale.
Un roumain débonnaire sorti de nulle part, souriant, ventripotent, portant en bandoulière une sorte de clavecin sur lequel il jouait, fort bien d'ailleurs, les notes traînantes, dégoulinantes, sirupeuses du Parrain s'approchait d'eux. Elle posa violemment ses coudes sur la table, pris sa tête entre ses mains, éclata en sanglots.
Publié par Fredi M. le février 27, 2018

mardi 27 février 2018
Chaussures en peau de porc





Ce matin je cirais mes pompes. "Un rien de Baranne pour dix jours de brillant", l'antique slogan publicitaire me revenait en mémoire. Le cirage de pompes, quand il ne consiste pas à obtenir des faveurs indues par de viles flagorneries, est en quelque sorte un temps de cerveau disponible où nos pensées en font à leur guise. Tout à mon brossage je constatais l’avancée des différents signes d'usure, de fatigue de mes chaussures : craquements profonds comme autant de rides irréversibles, semelles se décollant sournoisement. "Il serait temps d'en changer" me dis-je. Et je me souvins de cet ami qui ne jurait que par la qualité, homme de goût qu'il était et qu'il est toujours, qui me disait : "tu devrais acheter des chaussures en peau de porc. C'est increvable ; elles te feront une vie." Il exagérait bien sûr. Mais je décidais d'aller jeter un œil sur google, voir ce qui se faisait en la matière (c'est le cas de le dire) et à quel prix. Il me fut bien difficile de trouver des sites en proposant à la vente. En revanche il y avait pléthore de liens qui renvoyaient vers des blogs, où de braves gens se posaient des questions existentielles de la plus haute importance. En voici un exemple parmi d'autres :

Salam alikoum,
La question est :

Pour certaines chaussures de ville et certaines basquette, la semelle de celle-ci est faîtes soit en cuir de vachette, soit en cuir de porc.
Or, lorsqu'on marche, on transpire et un peu de la semelle déteint sur la chaussette......or comme le porc est impur, cela annule-t-il la prière?
Si qqn a la réponse..merci de transmettre la source..fatwa, hadith, site etc..
Salam alikoum !

(sic)

Pour mes tatanes haram en peau de porc je crois que je vais procéder autrement ...

Salam alikoum mes frères !

Publié par Fredi M. le février 27, 2018



2 commentaires:

  1. J'aime beaucoup, les 2 .
    En 2018, je ne vous lisais pas encore...

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    1. Ah ben j'ai bien fait de les republier alors ! ☺️

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Lâchez-vous !
Mais en gens bien élevés tout de même...