Avec "F", qui est la bonté faite homme, nous avons fait les derniers kilomètres qui nous séparaient de "S".
En dépit des aléas climatiques, "S" se porte comme un charme. Je crois qu'elle en a vu d'autres.
Nous sommes entrés dans la maison. "S" sentait les feux de cheminée éteints, les vieux plats refroidis ; son humidité accumulée durant tout l'hiver nous tomba sur les épaules. Tandis que j'ouvrais les volets, "F", qui arpentait les pièces, s'est arrêté devant ma bibliothèque.
- c'est curieux ça...
- quoi ?
- on dirait la bibliothèque de "P". En tout cas ça lui ressemble beaucoup.
- et pour cause : c'est la sienne. Je ne sais plus pourquoi mais il l'a amenée ici, un an avant de mourir.
"F" regardait les dos.
- tiens si tu t'ennuies tu peux lire ça, c'est joli. Je te le retourne pour que tu le retrouve facilement.
Le livre qu'il m'avait retourné, que je lis en ce moment, a pour titre "Climats", D'ANDRÉ MAUROIS
Au travers d'intrigues amoureuses, le roman court de la belle époque aux années folles. Avec sa parenthèse assassine. Avec "Climats", André Maurois s'adjuge, paraît-il, un lectorat féminin. Il faut dire que même remarquablement écrit, ça reste un peu cul-cul la praline, dans le genre d'un Marcel Proust, évoqué quelque part comme étant un "chroniqueur mondain".
Malgré tout voici un livre qui donne à voir ce qu'a pu être notre civilisation, sans crime "d'honneur", sans couteau, où l'altérité n'était pas un obstacle, un sacrilège, un péché à cacher, mais, pour les audacieux comme les timides, une frontière fragile et délicieuse, à franchir avec un bouquet de fleurs et quelques bons mots, une frontière à ne surtout pas défendre au risque de tout perdre : on abdique à genoux devant une femme. La masculanité toxique est remise à plus tard. Ou à jamais.
Une époque où la femme, quoi qu'on en dise aujourd'hui, avait la place de choix : la première.
L'amour, pas la guerre.
PS : Je ne suis pas sûr que la fin de ce billet soit très claire. Pas grave... On fera mieux la prochaine fois.